Elle a fait l'objet d'une âpre et longue bataille entre le ministère de la Défense et ceux de l'Économie et du Budget, entre le ministère de la Défense et les militaires. La loi de programmation militaire (LPM) sera présentée lors du dernier Conseil des ministres avant les vacances, vendredi 2 août. Elle dessinera l'armée française des années à venir. Certaines données vont faire grincer des dents. D'ici à 2019, sur ses 280.000 emplois, l'armée va en perdre 34.000 : 10.000 pertes déjà prévues par la majorité précédente ; 24.000 par l'actuelle. Selon nos informations, sur ces 24.000 nouvelles suppressions de postes, 8.000 concerneront les forces opérationnelles et 16.000 l'administration. Armée de terre, armée de l'air, marine nationale : toutes trois vont devoir se serrer la ceinture, les deux premières plus encore que la marine. "Parce que le ministre, le chef d'état-major des armées et la présidente de la commission à l'Assemblée sont bretons?" persifle un gradé de l'armée de terre.
Au moins deux bases aériennes et entre cinq et dix régiments devraient fermer, un sujet hautement sensible à l'approche des élections municipales. Dès septembre, les premières annonces de fermeture, héritées de la LPM précédente, devraient être rendues publiques. La dissuasion nucléaire devrait échapper aux mesures d'économies, une aberration selon l'ancien ministre de la Défense Hervé Morin : "C'est une grave erreur! La France n'a plus les moyens de s'offrir les deux composantes, océanique et aéroportée. Mais c'est un sujet tabou, on entre dans la symbolique de ce qui fait un chef…" Avis partagé par le général Desportes, ancien patron de l'École de guerre, désormais professeur à Sciences-Po : "Un luxe que nous ne pouvons plus nous offrir et qui va une nouvelle fois détériorer l'outil conventionnel."
Afin de privilégier la modernisation des matériels, l'achat de Rafale, d'avions de transport de troupes A400M, d'avions ravitailleurs A330-MRTT, de drones et d'engins blindés, l'armée va devoir procéder à de nombreuses mesures d'économies et faire rentrer de l'argent. Comment? En diminuant le nombre de postes. En réformant enfin les ressources humaines : entre 2011 et 2012, plusieurs sources évaluent entre 100 et 150 millions d'euros les salaires indûment payés en raison des défections de l'aberrant logiciel Louvois.
Près de 6 milliards de recettes espérées
Une somme qu'il s'agit désormais d'aller récupérer auprès des fonctionnaires concernés. Le taux d'encadrement (colonels et généraux) passerait de 17 à 16%. Quant au nombre de militaires déployés à l'étranger (les "opex"), il devrait passer de 30.000 à 15.000 ou 20.000.
Économies d'un côté, rentrées d'argent de l'autre… Des terrains et des bâtiments vont être vendus, pour une valeur estimée autour de 300 millions d'euros en 2014. Le ministère de la Défense, qui estime avoir hérité en mai 2012 d'au moins 3 milliards de commandes de matériel auprès des industriels non financées, table donc sur des recettes exceptionnelles, près de 6 milliards d'euros : ventes de fréquences dans la bande des 700 MHz aux opérateurs de téléphonie mobile en 4G et de télévision numérique ; cession de participations publiques dans des entreprises de défense telles que Nexter et Safran ; désengagement partiel au sein d'EADS… Mais surtout vente de matériel : lundi, la France a vendu pour un milliard d'euros de satellites militaires aux Émirats arabes unis.
Le ministre Jean-Yves Le Drian passe son week-end en Inde, afin de concrétiser l'achat de 126 Rafale, "en très, très bonne voie", indique une source militaire, contrairement à la piste brésilienne, abandonnée. Patricia Adam, députée (PS) du Finistère et présidente de la Commission de la défense nationale et des forces armées se montre optimiste : "La France est le seul pays d'Europe à ne pas baisser son budget militaire. La volonté du gouvernement est de maintenir les capacités de production de nos entreprises et de permettre à la France de pouvoir attaquer seule et la première, comme au Mali." Pour preuve, les forces spéciales, désormais commandées par le général de Saint-Quentin, patron de l'opération Serval au Mali, vont voir leurs effectifs augmenter de 1.000 hommes.
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