vendredi 11 octobre 2013

À Colmar, le ministre de la Défense à l’écoute de la « Grande Muette »

« Le 15-2 est le premier régiment de France. Cela aurait été une faute de ne pas venir. » Si l’on ne tient pas compte de la présence de Gérard Longuet en août 2011, lors de l’hommage rendu au capitaine Levrel, mort en Afghanistan, le 152e régiment d’infanterie n’avait plus eu les honneurs d’une visite ministérielle depuis belle lurette – mais le président Jacques Chirac était là en juin 2001.
« On n’est pas dans le technocratique »
Hier, Jean-Yves Le Drian, venu en avion de Villacoublay à Houssen, a passé près de six heures avec les hommes et les femmes du régiment colmarien. Entre la prise d’armes de 9 h 35 et le discours prononcé à la tribune, en début d’après-midi, il a enchaîné un tête-à-tête avec le chef de corps – le colonel Benoît Seguineau de Préval –, a visité bureaux et chambrées, a suivi un parcours du combattant, s’est fait expliquer l’usage d’un simulateur de tir… Pendant plus d’une heure, il a échangé avec les officiers et sous-officiers, avant de déjeuner au réfectoire avec des militaires du rang.
Le ministre multiplie ainsi les déplacements, à raison d’un par semaine en moyenne. D’habitude, il reste même plus longtemps, nous a-t-on assuré, mais hier, il devait être de retour à Paris à 17 h. « On n’est pas dans le technocratique. Il s’agit de faire le lien entre ce qui se dit au ministère à Paris et la réalité du terrain » , souligne le colonel Benoit Durieux, adjoint Terre du chef du cabinet militaire du ministre.
Hier, les échanges à huis clos ont été « francs et directs » , a résumé le colonel. Alors que le 152e RI s’est distingué, ces derniers mois, en envoyant des hommes au Liban, au Mali et en Jordanie, l’avenir des opérations extérieures (les « opex ») fait partie des préoccupations, au même titre que les perspectives de carrière, au sein d’une armée qui voit ses effectifs se réduire de plus en plus – on parle en haut lieu de « déflation ». Les contractuels, nombreux, se demandent s’ils ne vont pas servir de variable d’ajustement, à l’instar des intérimaires chez PSA. « Nous voulons au contraire augmenter leur nombre » , rassure l’entourage du ministre, qui rappelle aussi qu’il faut sans cesse de jeunes recrues pour occuper les fonctions de base (conducteur, tireur…), avant d’accéder aux grades de sous-officiers.
« La République vous doit des excuses »
Plus prosaïquement, il a aussi été question des difficultés d’approvisionnement en pièces détachées pour les matériels anciens et du manque de souplesse des groupements de soutien de base de défense, des services mutualisés (en l’occurrence pour le 152e RI et le Régiment de marche du Tchad à Meyenheim) qui compliquent l’organisation des activités quotidiennes et « la préparation opérationnelle ».
Mais comme partout, les soldats du 15-2 ont beaucoup parlé de « Louvois », le logiciel de paiement des soldes mis en place en 2008, dont les dysfonctionnements ont entraîné d’importants retards pour les uns, des trop-perçus pour d’autres. « Une vraie catastrophe, que j’ai trouvée en arrivant au ministère » , a rappelé Jean-Yves Le Drian, en soulignant qu’il avait été alerté lors d’un semblable déplacement sur le terrain. Un dispositif de gestion provisoire a été mis en place, et une décision doit être prise « dans les jours qui viennent, pour tourner la page définitivement ». « La République vous doit des excuses » , a lancé le ministre lors de son discours, assurant « qu’aucun militaire ne serait victime de cette incompétence ».
Bien sûr, à l’heure où le projet de loi de programmation militaire (LPM) pour la période 2014-2019 est en débat au Parlement, Jean-Yves Le Drian est aussi venu rassurer sur l’avenir (lire ci-dessous) et vanter les orientations proposées. Dans un « contexte complexe » , avec « des contraintes budgé-taires fortes » , la LPM réussirait ainsi à « renforcer et moderniser » l’appareil de défense de la France, pour faire de son armée « la première d’Europe » , en nombre et en capacité opérationnelle.
En guise d’au revoir, les soldats, qui n’applaudissent traditionnellement pas, ont chanté leur Strasbourgeoise , un chant de deuil et d’espoir…

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