C'est une histoire de communication, de réputation et d'image. Mardi, l'ONU publie un rapport affirmant que 1.271 civils ont été tués au premier semestre 2010 en Afghanistan, soit une hausse de 21% par rapport à l'année précédente. Si l'on prend en compte les blessés, le nombre de victimes civiles a même augmenté de 31%. Un bien mauvais bilan.
Mauvaise note mais bons élèves
Sauf que, selon l'ONU, pas moins de 76% de ces victimes sont à attribuer aux insurgés talibans, soit une hausse de 53% par rapport à 2009, due à l'augmentation des exécutions, assassinats et attentats suicides.
Dans le même temps, la coalition et l'armée afghane sont donc considérées comme des bons élèves avec une baisse de 30% par rapport à 2009 et, seulement, 386 morts et blessés civils à leur actif. Un « bon » résultat qui résulte officiellement de la politique mise en place par la coalition visant à diminuer le recours au soutien aérien et aux bombardements. Conclusion : les insurgés tuent, les coalisés protègent. Les conseillers de Barack Obama lancent d'ailleurs sensiblement le même message et affirment à tout va que la guerre en Afghanistan vise à la protection de la population civile, leitmotiv des États-Unis depuis 2001.
Les Talibans ont quant à eux estimé que ces chiffres relevaient de la propagande : « Il est clair que ce rapport est une tromperie politique, une exagération et de la propagande plutôt qu'une évaluation des faits ». Ainsi, alors que le rapport de l'ONU conclut à la mort de 69 civils dans des frappes aériennes dans les six premiers mois de l'année, le commandement des talibans affirme qu'au moins 300 civils ont péri lors de bavures de l'Otan. Conclusion des Talibans : les coalisés mentent. Les coalisés tuent.
Préservation de la population : il suffit de le faire croire
A qui se destinent ces messages difficile à vérifier ? En particulier à la population afghane qui devient de fait l'enjeu principal du conflit, la masse à manipuler. Une histoire de légitimation des combats, expliquent les trois colonels Hervé de Courrèges, Emmanuel Germain et Nicolas Le Nen dans leur livre « Principes de contre-insurrection ». « La légitimité est à conquérir en premier lieu auprès de sa propre opinion publique, puis auprès de celle de ses alliés et enfin au sein de celle du pays dans lequel elle agira », expliquent les trois auteurs. Et d'ajouter : « Il est donc indispensable de faire appel au plus vieux ressort de la guerre pour légitimer une intervention contre-insurrectionnelle : la préservation de la sécurité de la population ». Il suffit même parfois de le faire croire en usant de stratagèmes plus ou moins inventifs. Un des plus beaux exemples nous vient d'une expression des États-Unis s'apprêtant à attaquer l'Irak : la frappe chirurgicale. En somme, la guerre qui soigne. Beau principe.
Mais si « la guerre se gagne à coup d'éditoriaux », comme l'écrit armees.com, ou en jouant avec les chiffres, reste à ne pas oublier que chaque unité représente une victime supplémentaire, bien réelle celle-là.
http://www.francesoir.fr/armee/afghanistan-la-guerre-se-gagne-coup-deditoriaux
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