Quand c'est fini, ça recommence ! Malgré les assurances présidentielles réitérées, y compris le mois dernier après une nouvelle passe d'armes intragouvernementale entre le ministère de la Défense d'un côté et Bercy et Matignon de l'autre, le budget de la défense se trouve de nouveau sur la sellette. Cette fois, pourtant, la Défense était prévenue et la menace bien réelle était identifiée de longue date. Et pour cause ! Pour faire passer au forceps la loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019, le ministère de la Défense avait vendu la peau d'un ours avant de l'avoir tué.
Il s'est agi d'intégrer par avance au budget le produit de ventes non encore réalisées : celles de biens immobiliers des armées, mais surtout de la cession aux enchères aux opérateurs téléphoniques d'une bande de fréquences radio jusqu'alors réservée aux militaires, celle des 700 MHz. Cette "fréquence en or", qui permettra des usages innovants de la téléphonie mobile, doit être mise en vente par l'État. Ce dossier est surveillé (de très près) par l'Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes), dont Jean-Claude Mallet, conseiller d'État et principal conseiller du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, fut naguère le président. C'est dire si cette affaire a été gérée en connaissance de cause par l'hôtel de Brienne.
Parlementaires alarmés
Or il semble bien que cette attribution par avance au budget de la défense de sommes dont le gouvernement ne dispose pas encore pose de très sérieux problèmes. On parle ici de sommes considérables : 6,1 milliards d'euros sur la période 2014-2019, dont 1,77 milliard d'euros en 2014, autant en 2015, et 1,25 milliard d'euros en 2016. Pour 2014, les ressources proviendraient de cessions immobilières, les années suivantes étant concernées par cette vente de fréquences.Des membres des deux commissions spécialisées dans les affaires militaires de l'Assemblée nationale et du Sénat se sont réunis pour lancer un cri d'alarme. Cinq parlementaires sont intervenus : Patricia Adam, présidente socialiste de la commission de la Défense de l'Assemblée, et son collègue Jean-Jacques Bridey ; la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées du Sénat était représentée par son président Jean-Louis Carrère et son collègue socialiste Daniel Reiner, ainsi que par Jacques Gautier (UMP).
700 MHz, la fréquence en or
La démarche n'est pas si fréquente et elle doit être notée : la crainte d'une compression budgétaire considérable du budget militaire est d'autant plus sérieuse que ces ressources sont certes mentionnées dans la loi, qui ne prévoit aucune solution pour le cas où celles-ci ne seraient finalement pas disponibles.
Dans leur communiqué, les parlementaires notent que "les documents administratifs et financiers recueillis par les députés et les sénateurs à l'occasion de leurs contrôles font apparaître que les recettes de cession des fréquences de la bande des 700 MHz ne seront pas disponibles avant, au mieux, la fin 2015. Ce décalage de calendrier crée un manque de 1,5 milliard d'euros pour financer l'exécution de la loi de programmation militaire en 2015, en particulier le programme d'équipement des forces armées." Le 15 juillet, une mission conduite par l'Inspection générale des finances doit rendre son rapport sur le respect de la LPM votée en décembre 2013. Il sera alors temps de voir à quelle sauce le budget de la défense sera cuisiné. Il existe des risques sérieux qu'il ait réduit à la cuisson...
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