vendredi 17 juin 2011

Afghanistan : un retrait en ordre dispersé

Combien de soldats américains vont-ils être retirés d’Afghanistan au mois de juillet ? A Washington les pronostics sont ouverts. La mort d’Oussama Ben Laden le 1er mai a contribué à renforcer au Congrès et à la Maison Blanche le clan des partisans d’une réduction de l’engagement et des dépenses américaines. Pour ceux-là, l’endettement des Etats-Unis et les succès militaires qu’ils estiment avoir enregistrés sur le terrain contre les talibans ne justifient plus de maintenir un niveau d’engagement qui coûte 120 milliards de dollars par an (82 milliards d’euros) à la première puissance mondiale.
Fin 2009, Barak Obama avait décidé d’envoyer 30.000 soldats supplémentaires en Afghanistan, en s’engageant en même temps à commencer le retrait d’une partie des soldats américains en juillet sans en préciser le nombre. Un retrait qui devrait s’achever en 2014.
Une question qui déchire la classe politique
Alors que le président s’apprête à divulguer le chiffre des soldats qui pourront rentrer chez eux, la question déchire la classe politique : tandis que le sénateur républicain John Mc Cain préconise un départ symbolique de 3.000 soldats seulement, le sénateur démocrate Carl Levin propose, lui, le retrait de 15.000 hommes entre le mois de juillet et la fin de l’année.
Au sein de la Maison Blanche aussi, la question divise les membres du gouvernement. Certains mettent en doute la capacité des forces afghanes de sécurité à remplacer les unités étrangères après leur départ. Tandis que les autres, comme le vice-président Joe Biden, pensent que le contre-terrorisme, assorti de tirs ciblés de drones, est une stratégie plus efficace et moins coûteuse en vies humaines que la lutte armée dans cette guerre asymétrique qui dure depuis déjà plus de dix ans.
Privilégier le renseignement
Les deux nominations récentes de Léon Panetta, l’actuel directeur de la CIA désigné par Obama pour succéder à Robert Gates comme secrétaire à la défense et celle du Général David Petraeus qui devrait, lui, devenir directeur de la CIA, tendraient à montrer que le président veut privilégier le renseignement sur une guerre classique que l’utilisation des satellites et des drones ont rendue obsolète.
Ce n’est évidemment pas l’avis des militaires. Et l’état-major américain met en garde contre un retrait précipité des troupes en rappelant que les récentes victoires remportées contre les talibans sont fragiles et réversibles. Ainsi, dans les provinces du Kunar et du Nouristan, les talibans ont repris le contrôle de plusieurs districts à la faveur du retrait tactique des Américains.
Les Européens veulent un retrait massif
Ces tensions entre le pouvoir civil et les armées se retrouvent dans les pays européens, qui ont déployé 30.000 hommes au sein des troupes de l’Otan en Afghanistan. Mais il semble que les gouvernements aient déjà décidé de mettre en œuvre un retrait massif en dépit des pressions américaines.
Ainsi, malgré certaines réticences de son état-major, le président Sarkozy compte bien annoncer un début du retrait des troupes françaises (4.000 hommes) avant l'élection présidentielle de 2012. Dès le mois de septembre, L'armée française cédera le contrôle du district de Saroubi, au nord-est de Kaboul, aux forces afghanes et les soldats qui y sont déployés seront réaffectés dans la province de Kapisa. Près de 10 % des troupes seront alors renvoyées en France.
Conséquences de ces décisions de retrait, les Européens sont désormais encore un peu plus tenus à l’écart des grandes décisions stratégiques américaines. Comme cette "offensive diplomatique" vis-à-vis des insurgés de la région et l'ouverture d'un bureau de représentation officielle des talibans au Qatar que devrait annoncer Barack Obama dans son discours à la fin juin, en même temps que l’ampleur du retrait des soldats américains.
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/monde/20110615.OBS5195/afghanistan-un-retrait-en-ordre-disperse.html
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