Laurent Gbagbo et son épouse Simone arrêtés, Paris s'est empressé lundi d'opposer un ferme démenti aux affirmations propagées par leur entourage: le couple présidentiel n'a pas été appréhendé par les forces spéciales françaises, mais par celles d'Alassane Ouattara. «À aucun moment les forces françaises n'ont pénétré» dans la résidence présidentielle, a affirmé l'état-major en indiquant qu'elles avaient seulement été «en soutien de l'opération».
Une précision de taille: elle vise à ancrer l'idée que la France a agi dans le strict respect de son mandat onusien. C'est dans ce cadre, en effet, que les forces françaises de «Licorne», passées en quelques jours de 980 à 1700 hommes, ont aidé depuis le 4 avril les Casques bleus de l'Onuci à «protéger les civils» et à «prévenir l'usage d'armes lourdes», selon les termes de la résolution 1975 du 30 mars.
Les événements de lundi qui ont conduit à la capture de l'ex-président sont-ils conformes au «cahier des charges» de «Licorne»? Si les troupes pro-Ouattara ont pu finalement mettre la main sur Laurent Gbagbo, retranché dans son bunker depuis le 1er avril, il ne fait pas de doute que la voie leur a été ouverte par les troupes françaises et leur appui logistique.
Lundi matin, 200 à 250 militaires français ont été dépêchés dans le quartier de Cocody depuis leur camp de Port-Boué pour tenter de mettre un terme au statu quo qui durait depuis dix jours. Appuyées par des hélicoptères, ces troupes ont agi conjointement avec les Casques bleus togolais de l'Onuci. «En fin de matinée, les FRCI (favorables à Alassane Ouattara, NDLR) sont passées à l'attaque» , a précisé lundi le porte-parole de l'état-major français, le colonel Burkhard. «À 15 heures, M. Gbagbo s'est rendu» , a-t-il ajouté laconiquement.
«La paix et un regain d'essor économique»
Les obus de mortier tirés la semaine dernière sur la résidence de l'ambassadeur de France, vraisemblablement par les pro-Gbagbo, leur incursion dans l'ambassade du Japon n'ont pu qu'inciter Paris à en finir avec les provocations de Laurent Gbagbo. Les salves essuyées le week-end dernier par l'Hôtel du Golf, quartier général des rebelles, ont encore souligné le péril.De toute évidence, le projet d'Alassane Ouattara d'instaurer un «blocus» autour de la résidence présidentielle faisait long feu. La neutralisation des armes lourdes dont disposait le président sortant visait, en toute légitimité onusienne, à protéger les civils. Mais cette neutralisation a aussi logiquement conduit à débusquer le reclus de Cocody.
Tout un symbole, c'est de Claude Guéant qu'est venue lundi une des premières réactions, côté français, à la chute de Laurent Gbagbo. «Après les malheurs qui ont frappé ce pays, il va enfin connaître la paix et un regain d'essor économique. Il le mérite» , a estimé depuis Luxembourg le ministre de l'Intérieur, qui fut aussi, à l'Élysée, une cheville ouvrière de la politique africaine de Nicolas Sarkozy. À Matignon, François Fillon a reçu en fin d'après-midi les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, Bernard Accoyer et Gérard Larcher, pour les informer des opérations à Abidjan.
Vers un allégement du dispositif «Licorne»
La veille, le premier ministre leur avait déjà écrit pour souligner que les opérations lancées depuis lundi par «Licorne» conjointement avec les forces de l'Onuci «doivent permettre de restaurer les conditions de sécurité nécessaires au retour de l'ordre, ordre lui-même indispensable pour que les autorités ivoiriennes et les opérateurs humanitaires puissent venir au secours des populations».Pour le premier ministre, il s'agissait aussi d'apaiser les critiques concernant l'engagement de la France en Côte d'Ivoire. Certes, les sénateurs socialistes se sont dits lundi «satisfaits» de l'arrestation de Laurent Gbagbo. Mais le consensus observé jusqu'alors sur l'intervention française avait commencé à s'effriter ces jours derniers avec la prolongation de la crise. Certains, à gauche, n'étaient manifestement pas fâchés d'agiter le vieil épouvantail de la «Françafrique». D'autres, plus pondérés, appelaient à des «clarifications».
Lundi, alors que le couple Gbagbo venait d'être conduit à l'Hôtel du Golf, Nicolas Sarkozy a eu une longue conversation téléphonique avec Alassane Ouattara. Pour ce dernier, le soutien français dont il a bénéficié constitue aussi un assez lourd héritage politique. Rétabli dans ses droits, il va affronter les critiques de ceux qui vont dénoncer un président arrivé dans les fourgons de l'ex-puissance coloniale.
«Je souhaite que la situation ivoirienne nous conduise à alléger le dispositif «Licorne», en deçà des effectifs de 980 hommes», a déclaré lundi Gérard Longuet. Mais, dans l'immédiat, les forces françaises vont poursuivre leur mission de sécurisation, a souligné lundi l'état-major
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