La fin de la conscription a dix ans. Le recrutement dans les armées a évolué tandis que le service civique cherche sa place.
Dix ans après la suspension du service national officialisé par un décret du 27 juin 2001, cette mesure nourrit toujours un débat passionné entre les pour et les contre. Pour les uns, on a créé une brèche dans le creuset républicain en le supprimant. Pour les autres, la décision de Jacques Chirac répondait au besoin d'une armée professionnelle dans un monde de plus en plus heurté par les crises régionales.
Ils sont encore nombreux ceux qui font une apologie réfléchie du service militaire, temps choisi d'un brassage social des populations, favorisant la rencontre de l'autre et à même de contribuer au vivre-ensemble. Face aux nouvelles menaces contre lesquelles des professionnels aguerris disposant de technologies de dernière génération sont à même de lutter, les décideurs politiques ont exprimé et motivé leur préférence.
Journée défense et citoyenneté
Le seul contact que les jeunes ont désormais avec l'armée est la Journée défense et citoyenneté (JDC) qui a remplacé au début de l'année la Journée d'appel et de préparation à la défense (JAPD). C'est le moment opportun pour créer des liens, montrer la pluralité des métiers qui peuvent être exercées dans les armées au service de la République, expliquer le sens de l'engagement. Beaucoup d'efforts ont été accomplis pour en faire une journée marquante qui s'achève par la remise d'un certificat indispensable pour se présenter aux examens ou encore au permis de conduire. Lorsqu'en 1996, le président de la République a annoncé la professionnalisation des armées, il y avait environ 260 000 appelés pour une classe d'âge de 360 000 jeunes et l'on estimait qu'une moitié de cette génération effectuait ce que l'état-major appelait : un vrai service. Pourquoi, alors que nos forces sont engagées en Afghanistan, sur le théâtre libyen, toujours au Liban et en ex-Yougoslavie sans oublier une présence africaine justifiée, le débat se poursuit-il ?
Parce que les partisans d'une armée républicaine n'ont pas renoncé à faire valoir leurs arguments et s'érigent en gardiens du mythe fondateur de la bataille de Valmy (1792) avec son armée de volontaires déterminés à sauver la Révolution. Ce sont les mêmes qui assurent que le service a été un garant de la République et du lien entre l'armée et la nation que des associations défendent aujourd'hui avec foi.
Alternative et tradition
La société a recherché comment substituer des alternatives au service national. Après quelques tâtonnements, le service civique a émergé en 2010. Pendant six mois ou un an des jeunes âgés de 16 à 25 ans ont l'opportunité de mener à bien des missions d'intérêt général en se tenant à la disposition d'une association ou d'une collectivité territoriale. Tout reste ici basé sur le volontariat. Néanmoins, ce qui peut encourager le brassage social et favoriser la rencontre de personnes qu'on n'aurait pas côtoyé ailleurs mérite d'être développé. Les armées conservent dans l'opinion une image positive d'autant qu'elles ont fait de gros efforts de communication. Elles ont formé des personnels qui savent valoriser les atouts de l'arme où ils servent. Des films et des documents didactiques et pédagogiques ont été réalisés. Les jeunes qui se présentent aujourd'hui dans les centres d'information et de recrutement des forces armées (CIRFA) cherchent un parcours professionnel, des valeurs, et pour beaucoup ont un certain goût de l'aventure. On leur assure une solide formation et ils signent des contrats de durée variable et renouvelable. L'institution militaire est pour eux rassurante parce qu'elle fixe un cadre, des limites, parle de respect, de hiérarchie, de mission, de service à l'autre. A côté du recrutement, il demeure le besoin d'une réserve active et citoyenne. La formation militaire initiale du réserviste y participe. Elle est une porte qui ouvre sur d'autres façons de servir. Il est aussi important de ne pas décourager celles et ceux qui sont disponibles. Or la réorganisation des armées avec l'application du Livre blanc et la réduction des formats qui est à la clé ne facilite pas les choses.
http://www.lunion.presse.fr/article/aisne/une-generation-sans-service-national
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